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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/65

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de ce qu’ils avaient été jugés dignes de souffrir un outrage pour le nom du Christ ; et tous les jours ils ne cessaient d’enseigner et d’annoncer Jésus-Christ dans le temple et de maison en maison. Or en ces jours, comme le nombre des disciples augmentait, il s’éleva a chez les Grecs un murmure contre les Hébreux, parce que les veuves de ceux-là étaient dédaignées dans le service quotidien ». Il ne veut pas précisément parler de ce temps même, mais il suit l’usage de l’Écriture de donner comme présent ce qui doit arriver dans la suite. Je pense que par grecs il entend ceux qui parlaient cette langue, bien qu’ils fussent hébreux. C’est donc une nouvelle tentation, et si vous y faites attention, vous verrez que dès le début il y a eu des guerres au dedans comme au-dehors. « Mais les douze ayant convoqué la foule des disciples, dirent : Il n’est pas convenable que nous abandonnions la prédication pour vaquer au service des tables ». Très-bien : il faut en effet préférer le plus nécessaire au moins nécessaire. Mais voyez comme ils pourvoient à ce service, sans négliger la prédication. On choisit les plus respectables : « Frères, cherchez donc parmi vous sept hommes de bon témoignage, remplis de l’Esprit et de sagesse, à qui nous confierons ce service. Quant à nous, nous nous appliquerons à la prière et au ministère de la parole. La proposition fut agréée de toute la multitude ; et ils choisirent Étienne, homme rempli de foi et du Saint-Esprit ». Ainsi ceux que l’on choisit sont remplis de foi, afin d’éviter ce qui est arrivé à l’occasion de Judas, d’Ananie et de Sapphire. « Et Philippe, et Prochore, et Nicanor, et Timon, et Parmena, et Nicolas, a prosélyte d’Antioche, qu’ils présentèrent aux apôtres ; et ceux-ci, après avoir prié, leur imposèrent les mains. Et la parole du Seigneur s’étendait, et le nombre des disciples augmentait à Jérusalem ; beaucoup de a prêtres même obéissaient à la foi ». Mais revenons à ce qui a été dit plus haut : « Hommes, prenez garde à vous ! » Voyez comme Gamaliel leur parle avec douceur et en peu de mots ; il ne leur rappelle point d’anciennes histoires, bien qu’il le pût, mais des faits récents plus propres à confirmer ce qu’il avance. Aussi s’enveloppe-t-il d’une espèce d’énigme : « Avant ces jours-ci » ; comme pour dire : Il y a peu de temps. S’il eût dit tout d’abord Renvoyez ces hommes, il eût éveillé des soupçons, et sa parole n’aurait pas eu autant de force, mais les exemples qu’il cite lui en donnent une particulière. C’est pourquoi il ne se contente pas d’un seul exemple, mais en cite un second. Il aurait pu en produire un troisième, et prouver ainsi surabondamment qu’il avait raison, en les détournant de leur projet homicide : « Ne vous occupez pas de ces hommes ».
2. Considérez aussi sa mansuétude. Il ne parle pas longuement, mais brièvement, et mentionne les rebelles sans colère : « Et tous ceux qui s’étaient attachés à lui furent dispersés ». En disant cela, il ne blasphème point le Christ, mais il atteint son but : « Si l’œuvre est des hommes, elle tombera d’elle-même ». Il me semble faire ici un raisonnement et leur dire : « Comme elle n’est pas tombée, elle n’est donc pas de l’homme. Et peut-être vous vous trouverez combattre contre Dieu ». Pour les réprimer, il leur montre l’impossible, l’inutile « Mais si elle est de Dieu, vous ne pourrez ». Il ne dit pas : Si le Christ est Dieu, car l’œuvre même le prouvait ; il n’affirme point que l’œuvre soit humaine ni divine, mais il laisse au temps le soin de décider et de convaincre. Mais, dira-t-on, s’il a persuadé les juges, pourquoi ont-ils ordonné la flagellation ? Ils n’avaient, il est vrai, rien à objecter à ce langage si juste ; néanmoins ils ont voulu satisfaire leur fureur, et d’ailleurs ils pensaient par là épouvanter les apôtres. En parlant en l’absence de ceux-ci, Gamaliel eut plus de facilité à gagner les juges ; la douceur de sa parole et ses raisonnements fondés sur la justice les persuadèrent. Il leur prêchait presque l’Évangile ; bien plus, son langage si juste semblait leur dire : vous êtes bien convaincus que vous ne pouvez détruire cette œuvre. Pourquoi n’avez-vous pas cru ? Cette prédication est si grande, qu’elle a le témoignage même de ses ennemis. La première fois il y avait quatre cents hommes, la seconde fois une grande multitude ; ici les premiers étaient douze. Ne vous épouvantez donc pas de la foule qui s’y joint : « Car si l’œuvre est des hommes, elle tombera d’elle-même ». Il aurait encore pu citer un autre fait qui s’était passé en Égypte ; mais la preuve eût été superflue. Voyez-vous comme il conclut son discours en imprimant la crainte ? Il ne se contente pas d’ouvrir simplement son avis, pour ne pas avoir l’air de défendre les apôtres ; mais il raisonne d’après les événements. Il n’a pas osé affirmer que