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Page:Jean Chrysostome - Oeuvres complètes, trad Jeannin, Tome 9, 1866.djvu/73

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bien plus forte raison les fils seront-ils exclus, quoique bien avancés dans le chemin, puisqu’ils n’ont pas imité la foi de leur père. « Mais il promit de la lui donner et à sa postérité après lui ».
On voit ici la bonté de. Dieu et la foi d’Abraham. Car obéir « lorsqu’il n’avait point encore de fils », montre sa docilité et sa foi, surtout quand les faits semblaient démentir la promesse ; par exemple de n’avoir pas même où poser le pied quand il serait arrivé, de n’avoir pas de fils : ce qui n’était pas propre à affermir sa foi. Réfléchissons-y, nous aussi, et croyons aux promesses divines, même quand les événements semblent les contredire ; bien que chez nous, loin de les contredire, ils leur soient parfaitement conformes. Car là où il y a des promesses dans le monde, si les faits leur sont opposés, ils le sont réellement ; mais chez nous il en est tout autrement : Dieu a dit ici l’affliction, là le repos. Pourquoi confondre les temps ? Pourquoi tout renverser sens dessus dessous ? Vous vous affligez parce que vous vivez dans la pauvreté ? Et cela vous trouble ? Que cela ne vous trouble pas. Vous auriez raison de vous troubler, si vous deviez être affligé là-bas, mais la tribulation en ce monde est une source de repos. « Cette maladie », lisons-nous, « ne va pas à là mort ». Cette tribulation est une punition ; elle est une leçon et un amendement. Le présent est un temps de combat ; il faut donc lutter ; car c’est la guerre, c’est la lutte. Dans le combat, personne ne cherche le repos, personne ne cherche le plaisir, ni ne s’inquiète de ses biens, ni n’est en souci pour sa femme : on n’a qu’une chose en vue, vaincre l’ennemi. Faisons-en autant ; et si nous triomphons, si nous revenons avec les palmes, Dieu nous donnera tout. N’ayons qu’un seul souci : vaincre le démon ; ou plutôt ce n’est point là le résultat de nos efforts, mais uniquement l’effet de la grâce de Dieu. Que notre seule occupation soit donc de nous attirer la grâce, de nous procurer ce secours. « Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ? » N’ayons qu’un souci, c’est qu’il ne soit point notre ennemi, qu’il ne se détourne pas de nous.
4. Ce n’est point l’affliction, mais le péché qui est un mal. Le péché, voilà la véritable affliction, quand même nous vivrions dans le plaisir ; je ne parle pas seulement de l’avenir, mais du présent. Quels ne sont pas les remords de notre conscience ? Et est-il un tourment pire que celui-là ? Je voudrais interroger ceux qui vivent dans les vices, leur demander si le souvenir de leurs péchés ne leur revient jamais ? s’ils ne tremblent pas ? s’ils ne craignent pas ? s’ils ne souffrent pas ? s’ils n’appellent pas heureux ceux qui vivent au sein des montagnes, dans la pratique du jeûne et de la sagesse ? Voulez-vous goûter un jour le repos ? souffrez ici-bas pour le Christ, rien n’égale cette satisfaction. Les apôtres se réjouissaient d’avoir été flagellés. Paul nous y exhorte quand il dit : « Réjouissez-vous dans le Seigneur ». Et comment, direz-vous, se réjouir dans les fers, dans les tourments, devant les tribunaux ? On peut y goûter une très-grande volupté. Apprenez comment cela se fait : celui à qui sa conscience ne reproche rien, sera dans l’abondance de la joie ; en sorte que plus son affliction sera grande, plus son bonheur augmentera. Dites-moi, je vous prie : Un soldat, couvert de blessures, n’est-il pas très-heureux de revenir et de pouvoir montrer ces signes de courage, d’illustration et de gloire ? Et vous, si vous pouviez vous écrier comme Paul : « Je porte les stigmates de Jésus », vous pourriez aussi être grand, illustre et glorieux. Mais, dites-vous, il n’y à plus de persécution ? Alors combattez contre la vaine gloire ; et si quelqu’un dit du mal de vous, supportez-le pour l’amour du Christ. Combattez coutre la tyrannie de l’orgueil, contre la colère, contre les tentations de la concupiscence. Voilà des stigmates, voilà des épreuves. Dites-moi : qu’y a-t-il de plus terrible que des épreuves ? L’âme ne souffre-t-elle pas ? ne brûle-t-elle pas ? Là le corps seul est déchiré ; ici, l’âme souffre seule. Seule elle souffre quand elle se fâche, quand elle est envieuse, quand elle fait quelque chose de ce genre, ou pour mieux dire quand elle le souffre. Car ce n’est pas agir, mais souffrir, que de se mettre en colère, d’être jaloux ; aussi cela s’appelle maladies, blessures, plaies de l’âme. En effet, c’est maladie et pire que maladie.
Vous, qui vous livrez à la colère, songez que vous vous rendez malades. Donc, celui qui ne se fâche pas, ne souffre pas. Vous voyez que ce n’est pas celui qui reçoit l’injure qui souffre, mais celui qui la fait, comme je le disais plus haut. Il est évident qu’il souffre, puisque cela s’appelle passion. Et il souffre même dans le corps ; car la perte de la vue, la