Page:Jorga - Histoire des roumains et de leur civilisation, 1920.djvu/97

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venaient apporter dans l’Orient latin des idées nouvelles ; un d’entre eux, Filippo Buonaccorsi Callima-chus, devait avoir une influence décisive sur l’esprit du fils aîné et futur successeur de Casimir, Jean-Albert. Il ne faut surtout pas oublier la leçon de réalisme que donnait à tous ces imitateurs du passé la conquête turque, fondée sur des bases inébranlables. Pour la défense même d’une Pologne qui n’avait encore ni armée, ni trésor, ni chef généralement reconnu, il était nécessaire de confier la garde du Danube inférieur aux Roumains de la Moldavie ; pour être resserrée dans des frontières plus étroites, cette puissance n’en était que plus concentrée. Si l’on avait cru jadis pouvoir défendre l’indépendance polonaise contre les Ottomans par l’établissement d’une garnison dans Cetatea-Alba, prise sur l’héritage du faible Alexandre II, la conquête de la péninsule des Balcans par Mohammed II et l’apparition de la flotte turque dans la mer Noire devaient imposer au plus opiniâtre des rêveurs la conviction que seule une force indigène, intéressée en première ligne à défendre ce rivage, déjà fortifié par le premier Alexandre contre les nouveaux ennemis, pouvait écarter le plus grand des dangers.

Quant aux Turcs eux-mêmes, ils avaient éprouvé au siège de Belgrade leur première grande défaite ; satisfaits du tribut de 2.000 ducats de Hongrie promis par Pierre Aaron, ils pensaient plutôt à compléter leur base balcanique par l’annexion de la Bosnie et de l’Herzégovine, encore libres, qu’à entreprendre quelque chose du côté du Danube, où ils avaient été vaincus. Il fallut pour leur faire changer de direction les provocations du prince Vlad, qui, allié de Mathias et époux d’une parente du roi de Hongrie, se jeta, en 1461, au moment même où l’Occident était préoccupé par une nouvelle croisade, sur Giurgiu et les autres places danubiennes, massacrant méthodiquement les habitants,