Page:Joseph Gabet - Etat des missions de chine.djvu/24

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Pour la nécessité d’un clergé indigène abstractivement considérée, on l’admet assez généralement ; mais lorsqu’il s’agit de la réduire en pratique, on ne peut jamais s’y résoudre, et le motif qu’on donne presque toujours, est que les hommes de ces pays sont tellement dépourvus d’intelligence et faibles de caractère, qu’ils sont incapables de concevoir la grandeur de la dignité du sacerdoce et d’en observer les obligations.

Une seule réflexion fera sentir toute la faiblesse de cette allégation. Les Chinois ont su conserver leur empire depuis quatre mille ans ; ils possèdent depuis des milliers d’années, des arts que les siècles modernes de l’Europe s’enorgueillissent d’avoir inventés, tels que l’imprimerie, la poudre à canon, la boussole, l’art de filer et de tisser la soie, le système décimal appliqué à toutes les sortes de poids, de valeurs et de mesures, et bien d’autres qu’il serait trop long d’énumérer ; comment après cela les Européens osent-ils accuser cette nation de leur être inférieure en intelligence ?

Les Chinois possèdent des livres empreints d’une sagesse profonde et de la plus haute antiquité, tels que les King. Dans ces livres, au milieu des traditions les plus respectables, se trouvent des développements philosophiques qui laissent loin derrière eux toutes les productions européennes enfantées sous le paganisme ; et de plus, ils ont le bon sens de faire de ces doctrines des maximes obligatoires de gouvernement, ce en quoi ils sont plus sages que les Européens ; car en Europe, quoiqu’on ait l’avantage de posséder la révélation et les lois évangéliques, on ne se met guère en peine d’en faire la règle des États et de leur administration.

Quoique sous l’empire du paganisme, les Chinois ont des hospices d’enfants trouvés, de vieillards et de malades, des bureaux de bienfaisance où l’on distribue gratuitement la nourriture aux pauvres et des remèdes aux infirmes. Sur les routes, on trouve des monuments élevés pour le repos et le soulagement gratuit des voyageurs. Comment ose-t-on dire qu’une nation, abandonnée encore à la faiblesse de la philosophie païenne, et où néanmoins se rencontrent assez de lumières et de générosité pour produire tant de monuments de sagesse et de bienfaisance, une fois que la grâce de la