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19.
LAPLACE À LAGRANGE.
Paris, 20 juillet 1782.
Monsieur et très illustre Confrère,

La personne qui vous remettra cette Lettre est M. Brak, gouverner du fils de Mgr le Garde des Sceaux de France[1], et qui voyage avec lui en Allemagne. M. Brak est infiniment estimable par les qualités du cœur et de l’esprit. Il aime avec transport les Sciences et les Lettres, et regarde comme le principal objet de son voyage l’avantage de connaître et de converser avec les savants distingués répandus dans les divers pays qu’il doit parcourir. Votre connaissance est, par cette raison, ce qui doit l’intéresser davantage, et je me fais un sensible plaisir de lui procurer l’occasion de vous voir, bien persuadé d’ailleurs que vous serez enchanté de le connaître ; je lui envie bien sincèrement l’avantage qu’il aura de jouir de votre conversation ; mais, s’il est vrai, comme quelques personnes me l’assurent, que votre souverain vous rappelle en Italie, j’espère que vous passerez par Paris, et que je pourrai embrasser l’homme du monde que j’honore le plus, et lui témoigner de vive voix les sentiments profonds de considération et d’estime, qu’il a si bien su m’inspirer.

Je ne sais si vous avez reçu le dernier Mémoire que j’ai eu l’honneur de vous envoyer sur les suites ; on va en imprimer deux nouveaux de moi, l’un sur les comètes, et l’autre, fort étendu, sur les approximations des formules analytiques qui sont fonctions de très grands nombres tel est, par exemple, le coefficient du terme moyen du binôme cet un objet d’analyse neuf et infiniment intéressant, parce que ces formules se rencontrent à chaque pas, surtout dans la théorie des hasards, et que l’application des nombres à ces formules est souvent impraticable. Je ne me flatte pas d’avoir épuisé ce sujet ; mais la théorie

  1. Thomas Hue de Miromesnil. Il était Garde des Sceaux depuis 1774.