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grande partie sur le flux et le reflux de la mer, matière délicate et très compliquée ; je m’estimerais heureux si je pouvais avoir ajouté quelque chose à ce que l’on a fait avant moi, sur cette même matière. Vous y verrez la solution complète du problème qui fait l’objet du Traité de la cause des vents de M. d’Alembert[1], et dont cet illustre auteur n’a donné la solution que dans le seul cas où l’astre qui attire un fluide qui recouvre une planète immobile est lui-même immobile ; mais il y a beaucoup de mérite à avoir résolu ce cas, quoique très particulier, et je pense qu’il ne doit pas avoir lieu d’être mécontent de la manière dont j’ai parlé de son travail. Je désire bien de savoir ce que vous pensez de ma deuxième méthode pour déterminer les oscillations de la mer ; il m’a paru qu’elle donnait, d’une manière assez simple, la partie des oscillations du fluide qui est indépendante de sa figure et de son mouvement primitifs ; or cette partie est la seule qu’il soit intéressant de connaître, puisque l’autre doit être détruite à la longue. Je serai fort aise surtout de savoir votre avis sur l’explication que je trouve, du peu de différence qui existe entre les deux marées d’un même jour, différence qui serait énorme, suivant les résultats de Newton, dans les grandes déclinaisonsdu Soleil et de la Lune. Je vous avoue que ce peu de conformité avec la théorie et les observations m’avait toujours frappé.

M. Daniel Bernoulli tâche à la vérité d’en rendre raison, dans sa pièce sur le flux et le reflux de la mer[2], en disant que les changements qui sont dusà la rotation de la Terre sont trop vites pour que les marées puissent s’y accommoder ; mais vous verrez, je crois, par l’art. XIX de mes recherches, que cette raison est de peu de valeur, puisque la différence des deux marées d’un même jour pourrait être fort grande, malgré cette vitesse de rotation, dans une infinité d’hypothèses sur la profondeur de la mer, et que, dans les mêmes hypothèses où elle est très petite ou nulle, lorsqu’on a égard au mouvement de rotation de la Terre, elle serait très

  1. Réflexions sur la cause générale des vents. Paris, 1747, in-4o. Ce Mémoire avait obtenu un prix à l’Académie de Berlin en 1747.
  2. Traité sur le flux et le reflux de la mer, Mémoire couronné par l’Académie des Sciences en 1740. Il est imprimé au tome IV du Recueil des prix.