Page:Journal asiatique, série 1, tome 5.djvu/91

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près de ses enfans, il conclut l’affaire et se hâta d’unir les deux époux. Quelque tems après ce mariage, M. Tan tomba malade et mourut ; deux années s’écoulèrent, et M. Weï fut emporté de la même manière. Le jeune Weï, causant un jour avec son épouse, lui dit : Maintenant que nous voilà sans parens, nous ferions bien d’emporter leur dépouille mortelle, et de retourner dans notre ville natale. D’abord madame Tan étoit d’un avis contraire ; mais, voyant que son mari persistait fortement dans sa résolution, elle se rendit à ses instances. M. Weï rassembla les objets les plus pesans que contenait sa maison, ses meubles, ses fourneaux et ses outils de monnayeur, et les vendit. Ensuite les deux époux préparent les bagages et les provisions du voyage, et louent un bateau ; ils choisissent un jour heureux pour le départ, déposent dans le cercueil les corps inanimés de leurs parens ; et, chargés de ce précieux fardeau, se confient aux flots de la mer. Il faut vous dire que le maître du bateau se nommait Tchang. Les bateliers, comme l’on sait, sont des gens qui ne se piquent pas d’une grande probité.

Celui dont nous avons parlé était accoutumé à piller les passagers, et se fesait un revenu annuel de la vente des objets volés ; c’était uniquement là-dessus qu’il fondait son existence. Craignant donc que, s’il associait quelqu’un à ses larcins, une indiscrétion, ou la trahison, ne le fît enfin découvrir, il avait pris avec lui un homme muet, qui lui aidait à conduire la barque. Notre batelier, qui savait que Weï, avait été long-tems