Page:Kahn - Symbolistes et Décadents, 1902.djvu/90

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simples car déjà vues, claires parce qu’explicatives. Or, le lyrisme est exclusivement d’allure intuitive et personnelle, et la poésie va dans ce sens depuis cinquante ans (Hugo, Gautier, Nerval, Baudelaire, Heine), et rien d’étonnant à ce qu’un nouveau pas en avant fasse paraître le poète comme chantant pour lui-même, tandis qu’il ne fait au fond que syllabiser son moi d’une façon assez profonde pour que ce moi devienne un soi, c’est-à-dire l’âme de tous ; et si tous ne s’y reconnaissent pas tout de suite, c’est peut-être que les formes sensationnelles perçues par le poète ne se sont pas encore produites en eux, que peut-être il fallait que le poète les perçut le premier pour qu’une génération nouvelle inconsciemment s’en imprégnît et finît par s’y reconnaître. En face, la littérature traditionnelle continue son train-train, de concessions en concessions, et détient l’intelligence populaire, ravie d’entrer sans efforts dans des œuvres d’apparence renouvelée.

Ces théories ici trop rapides, vagues à force d’être condensées expliqueront-elles à M. Lemaître la prétendue obscurité de certains vers ? Faut-il ajouter qu’en un art serré, une technique bien comprise du vers, il faut éviter toute explication, toute parenthèse inutile, et que peut-être ces nécessités imposent au lecteur de se placer d’abord, par une première lecture, en l’état d’esprit du poète, et de ne comprendre complètement qu’à une seconde lecture.

Quant au symbole, très justement le critique remarque sa perpétuelle utilisation ; tout beau poème est un symbole ; une tragédie de Racine peut, étant une étude du jeu des passiojis, être considéiée comme sym-