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Dès cette première heure littéraire une avalanche de romans en vers se produit avec Chrestien de Troyes et ses suiveurs. Le XIVe siècle est forcé de les traduire en prose pour les rendre intelligibles.


III


Des alternatives de rigueur et de liberté dans les cadres poétiques se succèdent.

Au XVIe siècle, Jean Meschinot écrivait en tête d’un huitain : « Les huit vers ci-dessous se peuvent lire en trente-huit manières ; Crétin, d’un bout à l’autre de ses œuvres se tourmente à faire rimer ensemble non pas une et même deux syllabes de chaque vers mais un ou plusieurs mots tout entiers ».

Ce puritanisme d’un genre extravagant ne paraît guère porter bonheur aux poètes ni concourir au développement des pensées poétiques.

On doit bien prendre garde — avertissait déjà Horace — « de profaner ce nom (de poète) en le donnant sans distinction à tous ceux qui se mêlent de faire des vers ».

Et Sainte-Beuve se plaint de la pénurie littéraire des années contenues entre 1461 et 1515 qui « semblent avoir été aussi fertiles en faiseurs de vers que pauvres en véritables talents »[1].

Les premières réelles grâces d’esprit, les premières délicatesses d’émotion se trouvent alliées à des libertés plus grandes dans la prosodie.

Villon, plus tard Clément Marot, Ronsard et Des Portes enrichissent le trésor de la poésie nationale, non point par

  1. Sainte-Beuve. Poésie française au XVIe siècle, p. 18.