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INTRODUCTION DE L’AUTEUR.



Ce ne sera peut-être pas sans une certaine méfiance que le lecteur jettera les yeux sur cette petite brochure. Il supposera, de prime-abord, qu’il s’agit d’une utopie qu’on ne peut réaliser. Je le prie donc, avant tout, de vouloir bien dépouiller ce préjugé et d’examiner sérieusement, sans aucune prévention, la question que je me propose de traiter dans cet opuscule.

Je ne veux pas m’étendre longuement sur l’immense importance qu’aurait, pour l’humanité, l’existence d’une langue internationale admise par tous les peuples, d’une langue qui serait la propriété commune de l’univers entier, sans appartenir spécialement à aucune des nations existantes. que de temps et de peine il nous faut pour apprendre une où plusieurs langues étrangères ! Et pourtant, quand nous franchissons les frontières de notre patrie, il ne nous est pas toujours possible de nous faire comprendre de nos semblables. Que de temps, de peine et d’argent l’on sacrifie, pour traduire les œuvres littéraires d’une nation ! Et encore n’arrivons-nous à jouir que d’une partie bien infime des littératures étrangères, au moyen des traductions. Eh bien ! s’il existait une langue internationale, c’est en cette langue, généralement comprise, que se feraient toutes les traductions et que s’écriraient les ouvrages présentant par eux-mêmes un caractère international. Le mur infranchissable qui sépare les littératures tomberait, et les œuvres des autres peuples nous seraient aussi accessibles que celles de notre propre nation. La lecture deviendrait commune à tous, et avec elle l’éducation, la manière de voir, les aspirations, l’idéal : — les peuples ne formeraient plus qu’une famille.

Forcés d’économiser notre temps, pour l’employer à l’étude de plusieurs langues, nous ne sommes en état de le consacrer suffisamment à aucune. Aussi, d’une part, il est rare que l’on possède parfaitement même sa propre langue et, de l’autre, les langues, en général, ne se perfectionnent