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j’ose douce espérer, qu’en considération de sa grande importance, le lecteur voudra bien lui accorder un peu de son temps, et lire attentivement cette brochure jusqu’à la fin.

Je ne me propose pas d’analyser ici tous les essais qui se sont produits pour créer une langue internationale, Je me contenterai de faire remarquer que tous se sont bornés à imaginer un système de signes pour exprimer brièvement la pensée, ou se sont exclusivement attachés à soumettre la grammaire à une simplification naturelle et à remplacer les mots des langues actuelles par d’autres mots inventés au hasard.

Les essais de la première catégorie étaient si compliqués et si peu pratiques, qu’ils périssaient au fur et à mesure de leur naissances. Ceux de la seconde présentaient, à la vérité, quelque chose qui ressemblait à une langue, mais ne renfermaient rien d’international. Aussi ne sait-on pourquoi leurs auteurs les ont baptisés « langues universelles ». À moins que ce ne soit parce que, dans l’univers entier, il ne se trouverait pas une seule personne dont on puisse se faire comprendre à l’aide de ces systèmes. Si, pour rendre une langue universelle, il suffisait de lui en donner le nom, toutes celles qui existent pourraient le devenir au gré de chaque particulier.

Tous ces divers essais comptaient naïvement sur le plaisir que leur apparition causerait au monde, et sur l’approbation unanime qu’on leur accorderait indubitablement, Or, cette adhésion générale est précisément ce qu’il y a de plus difficile à obtenir, vu l’indifférence du monde pour tous les essais de plume, essais qui, ne lui rapportant pas un profit immédiat et palpable, ne doivent compter que sur sa bonne volonté à sacrifier son temps dans l’intérêt public. La masse s’intéresse peu à ces choses, et ceux qui n’y sont pas indifférents estiment que ce n’est pas La peine de perdre son temps à étudier une langue que personne ne comprend, hormis son auteur. Que tout le monde, dit-on, ou au moins quelques millions d’hommes, commencent d’abord par l’apprendre, et je l’apprendrai moi aussi. Voilà pourquoi tout système qui ne présentait d’utilité pour chaque adepte isolément, qu’à partir du jour où il aurait acquis un nombre suffisant d’adhérents, n’a pu trouver de partisans et est mort dès sa naissance. Si, malgré cela, l’un