Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 3.djvu/177

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ne me touche point : perdez une fantaisie qui vous rend malheureux, et ne me donnez pas plus longtemps le déplaisir de voir vos peines ; car c’en est un pour moi.

Ma curiosité augmentait à mesure que Soyecourt parlait ; les moindres détails me paraissaient intéressants. Mais, lui dis-je, peut-être que la sagesse de mademoiselle de Roye est le plus grand obstacle, et que, si elle voyait quelque possibilité que vous pussiez l’épouser un jour, elle vous traiterait différemment ? Ne pensez pas, me répondit-il, que j’aie négligé ce moyen. Quoique mon bien soit médiocre, il pourrait suffire pour vivre dans une aisance raisonnable. Je suis persuadé, d’ailleurs, que le ressentiment de mon oncle ne tiendrait pas contre les charmes et le caractère de mademoiselle de Roye, et je le lui ai dit avec toute la force que donne la persuasion, et avec toute la vivacité du sentiment.

Vous comptez trop sur le pouvoir de mes charmes, m’a-t-elle répondu ; et, quand j’y compterais autant que vous, je n’en serais pas plus disposée à accepter vos propositions. Tout mon cœur suffirait à peine pour m’acquitter de ce que je vous devrais ; des sentiments d’estime et de reconnaissance payeraient mal les vôtres ; je me reprocherais toujours d’être ingrate, et je ne pourrais cesser de l’être.

Tout ce que Soyecourt m’apprenait me peignait mademoiselle de Roye si aimable, par une noble franchise qui n’appartenait peut-être qu’à elle seule, qu’il acheva, par ses discours, l’impression que sa figure avait déjà faite sur moi. Une insensible piquait mon amour-propre, et, quoique je ne crusse pas assurément