Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 3.djvu/18

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renonce tout-à-la-fois à l’activité de l’intrigue, à la chaleur des disputes théologiques, aux plaisirs et aux tourments de l’amour ; le loisir, doucement occupé, remplace l’agitation des affaires ; à la dissipation succède une vie réglée et sédentaire ; pour effacer la célébrité peu honorable que lui avaient donnée ses agréments, ses succès et ses torts, elle aspire à la considération que procurent une sage conduite, des talents bien employés, et l’amitié des hommes de mérite. Sa maison devint le rendez-vous de beaucoup de savants et de gens de lettres ; et, pour que l’on n’ait point envie de confondre une telle réunion avec ces bureaux d’esprit, ces coteries littéraires, où les plus médiocres auteurs vont faisant échange de complaisances et d’applaudissements, pour se venger du public, qui les dédaigne ou les ignore, je dirai que Fontenelle et Montesquieu étaient les personnages les plus assidus de la société de madame de Tencin. À l’amitié de ces deux grands hommes elle joignit celle de Benoît XIV. Ce sucrage si respectable ne pouvait pas être seulement accordé au mérite, et il prouve combien madame de Tencin avait su réparer, par les qualités de son âge mûr, les inconséquences de sa jeunesse. Lorsque Lambertini n’était encore que cardinal, elle entretenait avec lui une correspondance assez suivie. Dès qu’il fut fait pape, il lui envoya son portrait.

Madame de Tencin, qui avait si fort contribué à porter son frère au comble des grandeurs et de la fortune, ne jouit jamais que d’un revenu très-médiocre. « Elle n’était nullement intéressée, dit Duclos ; elle regardait l’argent comme un moyen de parvenir,