Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 3.djvu/182

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pour se résoudre ; ce temps est expiré ; cependant, elle ne se détermine point ; il semble même qu’elle affecte de traiter M. du Boulai plus mal qu’elle ne le traitait d’abord. M. de Mailly n’a pas la force de se faire obéir ; j’ai tout à la fois à soutenir la douleur de mon fils, et la honte d’avoir fait une démarche inutile ; je ne trouve d’ailleurs que de l’opposition à tout ce que je veux. Mademoiselle de Roye s’avise de refuser les offres de M. de Mouy, qui, malheureusement pour lui, en est devenu amoureux, et qui est assez fou pour vouloir l’épouser. L’héroïsme dont elle se pare ne me fait point illusion : elle aime sûrement Soyecourt, et veut se conserver à lui. Mademoiselle de Mailly et elle sont dans le secret l’une de l’autre ; car les femmes ne sont jamais liées que par ces sortes de confidences. Ces personnes qui paraissent si raisonnables, ne sont rien moins que ce qu’elles paraissent.

L’envie et la jalousie de madame de Mailly s’exercèrent dans le portrait qu’elle me fit de l’une et de l’autre, et me confirmèrent dans la mauvaise opinion que j’avais déjà conçue de son caractère, que je découvrais à tous égards très différent de celui qu’elle se donnait dans le monde.

Comme j’étais bien éloigné de profiter de ses faiblesses, ses expressions étaient prises littéralement ; je ne sortais point des bornes de l’amitié, et je croyais me conserver par-là le droit de lui déclarer, lorsque je le voudrais, mes sentiments pour mademoiselle de Roye.

Les soupçons qu’on venait de me donner, qu’elle aimait Soyecourt, firent une vive impression sur moi ;