Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 3.djvu/209

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preuves ; il fallait en tirer une vengeance éclatante ; il fallait vous faire périr d’une mort ignominieuse.

Quel que soit son ascendant sur l’esprit de M. de Mailly, elle ne put l’engager à des projets si odieux. Par complaisance pour lui, elle parut y renoncer, à condition cependant que mademoiselle de Mailly épouserait M. du Boulai, dans l’état où il était. Il faut, disait-elle, qu’elle prenne la qualité de sa femme, pour m’assurer qu’elle ne sera jamais celle de son meurtrier ; de plus, M. du Boulai désirait ce mariage avec tant d’ardeur, que ce serait peut-être un moyen de lui sauver la vie.

Séduit par ses caresses et ses artifices, M. de Mailly se détermina à faire à sa fille cette étrange proposition. Elle répondit à son père avec tant de force et de courage, et cependant avec tant de respect et de tendresse, qu’il se vit forcé à lui tout déclarer. Madame de Mailly, lui dit-elle, devrait être rassurée par ce même enlèvement de mademoiselle de Liancourt, dont elle veut se servir contre M. de Châlons. Mais, si cette raison ne lui suffit pas, j’engage ma parole de n’épouser jamais M. de Châlons, et je vous l’engage à vous, mon père, à qui rien dans le monde ne serait assez puissant pour me faire manquer.

Ce n’était pas assez pour madame de Mailly, qui vous craignait encore moins que milord d’Arondel, et qui voulait acquérir une autorité entière sur mademoiselle de Mailly. Elle renouvelait ses menaces, elle insistait pour le mariage. Mademoiselle de Mailly aurait préféré la mort ; mais elle tremblait pour vous ; elle connaissait la faiblesse de son père ; et je ne sais