Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 3.djvu/216

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pressé d’un mouvement de dépit, il avait une sorte d’impatience d’être hors d’un lieu où il avait si ardemment désiré de se trouver.

Les députés de la ville, qui demandèrent à le voir, lui fournissaient le prétexte dont il avait besoin pour s’éloigner, si M. de Vienne, persuadé que sa présence et celle de sa fille ajouteraient quelque chose de plus flatteur aux honneurs qu’on lui rendait, n’eût ordonné de faire entrer les députés.

Le comte de Canaple les reçut avec un air de satisfaction, qu’il empruntait de son dépit. C’était une vengeance qu’il exerçait contre madame de Granson, à qui la reconnaissance publique reprochait son insensibilité et son ingratitude.

Un gentilhomme de mademoiselle de Mailly, du nombre des députés, avait ordre de remercier en particulier le comte de Canaple. Mademoiselle de Mailly, seigneur, ajouta-t-il, lorsqu’il eut rempli sa commission, vous prie de la voir aujourd’hui, s’il vous est possible. Ce sera tout à l’heure, répondit-il assez haut pour être entendu de madame de Granson ; et, s’acquittant tout de suite de ce qu’il devait aux députés, il sortit avec eux. M. de Vienne le laissa en liberté de faire une visite où il croyait que les témoins lui seraient importuns, et alla, suivant sa coutume, visiter les différents quartiers de la ville.

Madame de Granson avait besoin de la solitude où on la laissait ; elle ne pouvait plus soutenir la contrainte qu’elle s’était faite. À peine fut-elle seule, qu’elle entra dans un cabinet où elle s’enferma, et, se jetant sur un lit de repos, elle s’abandonna tout entière à sa dou-