Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 3.djvu/224

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voyez celui que vous fuyez ; c’est moi, c’est un mari qui vous adore, que votre perte faisait mourir de douleur. La surprise, le trouble et la joie de madame d’Arondel faillirent à lui coûter la vie : elle resta sans connaissance dans les bras de son mari.

À la vue de cet accident, milord d’Arondel, saisi de crainte, hors de lui-même, demandait du secours à tout ce qui l’environnait. Il mit sa femme au bord du ruisseau, il lui en jetait de l’eau sur le visage, il la priait dans les termes les plus tendres de lui répondre ; mais tous ses soins étaient inutiles : elle ne revenait point.

On la porta dans une petite maison du jardinier, qui était proche. Après avoir employé tous les remèdes dont on put s’aviser, elle donna quelque marque de sentiment ; ses yeux s’ouvrirent quelque temps après, et cherchèrent milord d’Arondel. Il était à genoux auprès d’elle, la bouche collée sur une de ses mains. Madame d’Arondel le regarda quelque temps, et, lui jetant au cou le bras qui lui restait libre, demeura dans cette situation.

Le saisissement où ils étaient l’un et l’autre, ne leur permit pas sitôt de parler ; leurs regards se confondaient et se disaient tout ce qu’ils ne pouvaient se dire. Madame d’Arondel prenait les mains de son mari, qu’elle baisait à son tour. À ces premiers moments succédèrent mille questions, toujours interrompues par de nouveaux témoignages de tendresse.

Il fallut songer à mettre madame d’Arondel dans un lieu où elle pût passer la nuit avec moins d’incommodité : elle aurait pu entrer dans le couvent ; mais milord