Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 3.djvu/230

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répondit avec beaucoup de fermeté que les habitants et lui sauraient mourir les armes à la main ; mais qu’il croyait le roi d’Angleterre trop prudent et trop généreux pour réduire de braves gens au désespoir.

De retour au camp, milord d’Arondel et M. de Mauny mirent tout en usage pour fléchir la colère de leur maître ; ils lui représentèrent avec force que la sévérité dont il voulait user envers les assiégés pourrait être d’une dangereuse conséquence, et donner droit à Philippe de l’imiter. Je veux bien, leur dit Édouard, après avoir rêvé quelque temps, accorder au gouverneur la grâce qu’il demande, à condition que six bourgeois, natifs de Calais, me seront livrés la corde au cou pour périr par la main du bourreau. Il faut que leur supplice effraie les villes qui, à l’exemple de celle-ci, voudraient me résister. Milord d’Arondel et M. de Mauny furent contraints de porter cette terrible réponse à M. de Vienne.

Avant que d’assembler le peuple, il alla dans l’appartement de madame de Granson, suivi du comte de Canaple, qu’il avait prié de l’accompagner. Il faut, ma chère fille, lui dit-il en l’embrassant, nous séparer ; je vais exposer au peuple la réponse d’Édouard, et, au défaut des six victimes qu’il demande, et que je ne pourrai lui donner, j’irai lui porter ma tête ; peut-être se laissera-t-il fléchir : peut-être préviendrai-je le malheur de cette ville et le votre : ma mort me sauvera du moins de la honte et de la douleur d’en être témoin. Si je suis écouté, votre retraite est libre ; et, si je péris sans vous sauver, je demande à M. de Canaple, dont je connais la valeur, de mettre tout en usage pour