Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 3.djvu/26

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personne d’y avoir une part, ce sont les Malheurs de l’Amour. Il est écrit en forme de Mémoires comme le Comte de Comminge. Cette forme, ainsi que la forme épistolaire, me paraît avoir des avantages très-réels sur l’autre. Ici c’est le héros d’une histoire qui la raconte lui-même ; là, ce sont les principaux personnages d’une action qui se communiquent réciproquement ce qu’ils ont fait ou dit, vu ou entendu : le lecteur se trouve naturellement instruit par eux-mêmes de leurs pensées les plus intimes. Il n’en est pas de même des romans où l’auteur décrit des aventures qui lui sont étrangères : tout en jouissant de l’art avec lequel il semble démêler les causes secrètes qui ont produit tel événement, mis en jeu telle passion, je ne sais quoi nous dit qu’il n’a pas pu être informé de tout ce qu’il nous apprend, et que son histoire n’est qu’une fable ; or, on sait qu’en général le mérite d’un ouvrage de fiction se mesure sur l’air plus ou moins grand de vérité qui s’y fait sentir, et que la continuité de l’illusion est le plus beau triomphe qu’il puisse obtenir. Le roman des Malheurs de l’Amour, remplit parfaitement son titre : l’amour en effet y cause un enchaînement d’infortunes que termine de la manière la plus douloureuse la mort violente de ce Barbasan, toujours si aimé et si digne de l’être, lorsque les apparences les plus fortes accusent sa fidélité. Il existe entre ce roman et celui du Comte de Comminge un rapport très-honorable ; c’est qu’il offre comme lui une foule d’instructions salutaires. Elles ne consistent pas en froids et vains discours ; elles résultent des malheurs produits par l’oubli des devoirs ou des règles de la prudence. L’action est