Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 3.djvu/301

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du jour où il avait fixé son départ, nous eûmes une peine extrême à nous quitter. Barbasan revint deux ou trois fois de la porte ; il lui restait toujours quelque chose à me dire.

Un valet de chambre, qui était auprès de lui depuis son enfance, m’apportait tous les matins une lettre : je ne devais pas douter qu’il ne vînt le lendemain à l’heure ordinaire, puisque son maître devait attendre son retour, pour monter à cheval ; je lui répétai, cependant, une infinité de fois, de ne pas manquer à me l’envoyer. Je me levai plus matin qu’à l’ordinaire. J’allai chercher Eugénie, uniquement pour lui parler du chagrin où j’étais de ce que Barbasan serait quelques jours absent.

L’heure où j’avais accoutumé d’attendre son homme n’était pas encore venue, que je m’impatientais de ce qu’il ne paraissait point. Ce fut bien autre chose, quand cette heure et plusieurs autres furent passées. Mon laquais, que j’envoyai aux nouvelles, après s’être fait attendre deux autres heures, qui me parurent deux années, vint me dire qu’il n’avait trouvé personne.

Je passai, de cette sorte, dans une agitation qui ne me permettait pas d’être un moment dans la même place, une grande partie de la journée. Quelqu’un vint alors avertir Eugénie qu’on la demandait à mon parloir. Cette nouveauté acheva de m’alarmer ; j’y courus ; j’y trouvai le vieux valet de chambre. Où est votre maître, lui dis-je, d’une voix tremblante ? Ah ! s’écria-t-il, tout est perdu !

Ces paroles, qui me portèrent dans l’esprit les idées les plus funestes, furent les seules que j’entendis. Je