Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 3.djvu/338

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quoique leur mariage eût été arrêté, et qu’il y eût consenti. C’est un homme perdu dans le monde. Il a paru vous aimer ; vous ne l’auriez peut-être pas haï : voyez combien vous devez au comte de Blanchefort de vous avoir sauvée du péril où vous étiez exposée.

Le procédé du marquis de la Valette donnait à mademoiselle d’Essei tant d’indignation contre lui, et tant de colère contre elle-même de la préférence qu’elle lui avait donnée dans son cœur, que son estime pour le comte de Blanchefort en augmentait ; elle trouvait qu’elle avait à réparer avec lui. Il vint les joindre, plus amoureux encore, s’il était possible, qu’il ne l’avait été.

Madame de Polignac était un peu malade quand il arriva ; mais son mal paraissait si médiocre, que mademoiselle d’Essei n’en était point alarmée : la fièvre augmenta si fort le lendemain et les jours suivants, que l’on commença à craindre pour sa vie. Dès qu’elle connut l’extrémité où elle était, elle fit approcher mademoiselle d’Essei et le comte de Blanchefort : Ma mort, dit-elle au comte, va priver mademoiselle d’Essei des secours qu’elle pouvait attendre de mon amitié ; mais je lui laisse en vous plus qu’elle ne perd en moi : j’eusse voulu être témoin de votre union et de votre bonheur.

Non, madame, s’écria le comte de Blanchefort, nous ne vous perdrons point : le ciel vous rendra à nos larmes ; vous serez témoin de notre bonheur… Mais pourquoi le différer, poursuivit-il ? Je puis, dès ce moment, recevoir la foi de mademoiselle d’Essei, et lui donner la mienne. Consentez à mon bonheur, ajouta-t-il en se jetant aux pieds de mademoiselle d’Essei ; payez