Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 3.djvu/393

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pour l’un et pour l’autre. Non, non, m’écriai-je encore, il faut me dire mon crime, ou me rendre une estime sans laquelle je ne puis vivre !

Vous l’auriez conservée, reprit-il, si vous aviez eu pour moi la sincérité que je vous avais demandée ; elle vous aurait tenu lieu d’innocence ; loin de vous reprocher vos faiblesses, j’aurais mis tous mes soins à vous en consoler, à vous les faire oublier ; mais vous ne m’avez pas assez estimé pour me croire capable d’un procédé généreux : il vous a paru plus sûr de me tromper, et vous n’avez pas même daigné prendre les précautions nécessaires pour y réussir.

J’étais si étonnée, si troublée de ce que j’entendais, que M. d’Hacqueville eut le temps de me dire tout ce que son ressentiment lui inspirait, avant que j’eusse la force de répondre ; j’étais cependant bien éloignée de comprendre que l’on me croyait mère du fils de Barbasan. Ce que je ressentis, lorsque enfin je fus instruite de mon prétendu crime, ne se peut exprimer. Toutes mes douleurs passées étaient faibles au prix de celle-là ; on n’a point de courage contre un malheur de cette espèce, ou l’on serait peu sensible à l’honneur si on avait la force d’en faire usage.

Mes larmes furent long-temps ma seule défense : Quoi ! dis-je d’un ton qui, à travers le désespoir, marquait ma surprise et mon indignation, vous accusez votre femme d’un crime honteux ! Vous la réduisez à la nécessité de se justifier ! vous lui faites subir cette humiliation ! Ah ! poursuivis-je, vous serez pleinement éclairci. M. le curé de Saint-Paul vous apprendra de quelle façon j’ai eu connaissance de ce malheureux