Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 3.djvu/398

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puis, qu’avais-je à perdre ? une malheureuse vie dont je souhaitais à tout moment la fin.

J’étais restée un soir dans la forêt encore plus tard qu’à l’ordinaire. Dans le plus fort de ma rêverie, je me sentis tout d’un coup saisie par un homme qui, malgré mes cris et mes efforts, m’emportait, quand un autre, sorti du plus épais du bois, vint à lui l’épée à la main : je profitai de la liberté que leur combat me donnait pour fuir de toute ma force : mes gens, que mes cris avaient appelés, coururent au secours de mon défenseur. J’étais si troublée et si éperdue, qu’on fut obligé de me mettre au lit dès que je fus arrivée.

Peu de temps après, j’appris que celui qui m’avait secourue avait blessé à mort l’homme qui voulait m’enlever ; mais qu’il l’avait été lui-même d’un coup de pistolet par un autre homme venu au secours du premier ; que mon défenseur avait eu assez de force pour aller sur cet homme ; qu’il lui avait passé son épée au travers du corps, et l’avait laissé mort sur la place ; que ceux qui gardaient, à quelque distance de là, des chevaux et une chaise, apparemment destinée pour moi, avaient pris la fuite.

J’ordonnai qu’on portât au château mon défenseur, et je fis en même temps monter à cheval plusieurs personnes pour aller chercher les secours dont il avait besoin. Mon homme d’affaires, par humanité, et dans la vue de tirer quelque éclaircissement sur les auteurs de cette violence, y fit porter en même temps l’autre blessé, et cette précaution ne fut pas inutile.

Cet homme, à qui les approches de la mort fai-