Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 3.djvu/44

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Je l’attendis long-temps ; elle vint enfin. Ce ne fut plus des emportements et des fureurs que j’eus à combattre, ce fut une mère tendre, qui entrait dans mes peines, qui me priait avec des larmes, d’avoir pitié de l’état où je la réduisais. Quoi ! mon fils, me disait-elle, une maîtresse, et une maîtresse encore que vous ne connaissez que depuis quelques jours, peut l’emporter sur une mère ! Hélas ! si votre bonheur ne dépendait que de moi, je sacrifierais tout pour vous rendre heureux. Mais vous avez un père qui veut être obéi ; il est prêt à prendre les résolutions les plus violentes contre vous : voulez-vous m’accabler de douleur ? étouffez une passion qui nous rendra tous malheureux.

Je n’avais pas la force de lui répondre : je l’aimais tendrement ; mais l’amour était plus fort dans mon cœur. Je voudrais mourir, lui dis-je, plutôt que de vous déplaire, et je mourrai si vous n’avez pitié de moi. Que voulez-vous que je fasse ? Il m’est plus aisé de m’arracher la vie, que d’oublier Adélaïde. Pourquoi trahirais-je les serments que je lui ai faits ? Quoi ! je l’aurais engagée à me témoigner de la bonté, je pourrais me flatter d’en être aimé, et je l’abandonnerais ! Non, ma mère, vous ne voulez pas que je sois le plus lâche des hommes.

Je lui contai alors tout ce qui s’était passé entre nous. Elle vous aimerait, ajoutai-je, et vous l’aimeriez aussi ; elle a votre douceur, elle a votre franchise ; pourquoi voudriez-vous que je cessasse de l’aimer ? Mais, me dit-elle, que prétendez-vous faire ? votre père veut vous marier, et veut, en attendant, que vous alliez à la campagne ; il faut absolument que vous