Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 3.djvu/45

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paraissiez déterminé à lui obéir. Il compte vous faire partir demain avec un homme qui a sa confiance. L’absence fera peut-être plus sur vous que vous ne croyez ; en tout cas, n’irritez pas encore M. de Comminge par votre résistance ; demandez du temps. Je ferai de mon côté tout ce qui dépendra de moi pour votre satisfaction. La haine de votre père dure trop long-temps : quand sa vengeance aurait été légitime, il la pousserait trop loin ; mais vous avez eu un très-grand tort de brûler les papiers ; il est persuadé que c’est un sacrifice que madame de Lussan a ordonné à sa fille d’exiger de vous. Ah ! m’écriai-je, est-il possible qu’on puisse faire cette injustice à madame de Lussan ? Bien loin d’avoir exigé quelque chose, Adélaïde ignore ce que j’ai fait, et je suis bien sûr qu’elle aurait employé, pour m’en empêcher, tout le pouvoir qu’elle a sur moi.

Nous prîmes ensuite des mesures, ma mère et moi, pour que je pusse recevoir de ses nouvelles. J’osai même la prier de m’en donner d’Adélaïde, qui devait venir à Bordeaux. Elle eut la complaisance de me le promettre, en exigeant que, si Adélaïde ne pensait pas pour moi comme je le croyais, je me soumettrais à ce que mon père souhaiterait. Nous passâmes une partie de la nuit dans cette conversation, et, dès que le jour parut, mon conducteur me vint avertir qu’il fallait monter à cheval.

La terre où je devais passer le temps de mon exil, était dans les montagnes, à quelques lieues de Bagnières, de sorte que je fis la même route que je venais de faire. Nous étions arrivés d’assez bonne heure, le second jour de notre marche, dans un village où nous devions