Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 3.djvu/59

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extrême, elle avait cependant je ne sais quelle douceur inséparable, dans quelque état que l’on soit, de l’assurance d’être aimé.

Après quelques mois de séjour dans le lieu où nous étions, ma mère reçut ordre de mon père de retourner auprès de lui ; il n’avait presque pris aucune part à ma maladie ; la manière dont il m’avait traité avait éteint en lui tout sentiment pour moi. Ma mère me pressa de partir avec elle ; mais je la priai de consentir que je restasse à la campagne, et elle se rendit à mes instances.

Je me retrouvai encore seul dans mes bois ; il me passa dès-lors dans la tête d’aller habiter quelque solitude, et je l’aurais fait, si je n’avais été retenu par l’amitié que j’avais pour ma mère. Il me venait toujours en pensée de tâcher de voir Adélaïde ; mais la crainte de lui déplaire m’arrêtait.

Après bien des irrésolutions, j’imaginai que je pourrais du moins tenter de la voir sans en être vu.

Ce dessein arrêté, je me déterminai d’envoyer à Bordeaux, pour savoir où elle était, un homme qui était à moi depuis mon enfance, et qui m’était venu retrouver pendant ma maladie ; il avait été à Bagnières avec moi ; il connaissait Adélaïde ; il me dit même qu’il avait des liaisons dans la maison de Benavidés.

Après lui avoir donné toutes les instructions dont je pus m’aviser, et les lui avoir répétées mille fois, je le fis partir. Il apprit, en arrivant à Bordeaux, que Benavidés n’y était plus, qu’il avait emmené sa femme, peu de temps après son mariage, dans des terres qu’il avait en Biscaye. Mon homme, qui se nommait Saint-