Page:La Fayette, Tencin, Fontaines - Œuvres complètes, Lepetit, 1820, tome 3.djvu/80

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Je vais, continua-t-elle, vous donner, par une entière confiance, la plus grande marque d’estime que je puisse vous donner ; aussi-bien l’aveu que j’ai à vous faire m’est-il nécessaire pour conserver la vôtre ; allez retrouver votre frère ; une plus longue conversation pourrait lui être suspecte, revenez ensuite le plutôt que vous pourrez.

Je sortis, comme madame de Benavidés le souhaitait. Le chirurgien avait ordonné qu’on ne laissât entrer personne dans la chambre de M. de Benavidés ; je courus retrouver sa femme, agité de mille pensées différentes : je désirais de savoir ce qu’elle avait à me dire, et je craignais de l’apprendre. Elle me conta comment elle vous avait connu, l’amour que vous aviez pris pour elle le premier moment que vous l’aviez vue. Elle ne me dissimula point l’inclination que vous lui aviez inspirée.

Quoi ! m’écriai-je à cet endroit du récit de dom Gabriel, j’avais touché l’inclination de la plus parfaite personne du monde, et je l’ai perdue ! Cette idée pénétra mon cœur d’un sentiment si tendre, que mes larmes, qui avaient été retenues jusque-là par l’excès de mon désespoir, commencèrent à couler.

Oui, continua dom Gabriel, vous en étiez aimé. Quel fonds de tendresse je découvris pour vous dans son cœur, malgré ses malheurs, malgré sa situation présente ! Je sentais qu’elle appuyait avec plaisir sur tout ce que vous aviez fait pour elle ; elle m’avoua qu’elle vous avait reconnu, quand je la conduisis dans la chambre où vous peigniez ; qu’elle vous avait écrit, pour vous ordonner de partir, et qu’elle n’avait pu