Page:La Fontaine - Contes, Herhan, 1803.djvu/301

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Sera-ce trop s’il donne son mulet
Pour le retour ? Mon mulet ? et parguenne
Dit le premier des villageois susdits,
Chacune vaut en ce monde son prix ;
La mienne ira but à but pour la tienne ;
On ne regarde aux femmes de si près :
Point de retour, vois-tu, compère Etienne,
Mon mulet, c’est… c’est le roi des mulets.
Tu ne devrais me demander mon âne
Tant seulement : troc pour troc, touche là.
Sire Oudinet raisonnant sur cela
Dit : Il est vrai que Tiennette a sur Jeanne
De l’avantage, à ce qu’il semble aux gens ;
Mais le meilleur de la bête à mon sens
N’est ce qu’on voit ; femmes ont maintes choses
Que je préfère, et qui sont lettres closes ;
Femmes aussi trompent assez souvent
Jà ne les faut éplucher trop avant.
Or sus voisins, faisons les choses nettes
Vous ne voulez chat en poche donner
Ni l’un ni l’autre, allons donc confronter
Vos deux moitiés comme Dieu les a faites.
L’expédient ne fut goûté de tous :
Trop bien voilà messieurs les deux époux
Qui sur ce point triomphent de s’étendre
Tiennette n’a ni suros ni malandre,
Dit le second. Jeanne, dit le premier,
A le corps net comme un petit denier ;
Ma foi c’est basme. Et Tiennette est ambroise,
Dit son époux ; telle je la maintien.
L’autre reprit : Compère tiens-toi bien ;
Tu ne connais Jeanne ma villageoise ;