Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 12.djvu/359

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gnols et d’étrangers qui brûlaient de tenter la fortune, ou de se signaler par des aventures extraordinaires. Ojéda trouva des fonds dans Séville pour armer quatre vaisseaux. Il prit pour premier pilote Jean de la Cosa, natif de Biscaye, homme d’expérience et de résolution ; et Améric Vespuce, riche négociant florentin, versé dans la cosmographie et la navigation, voulut avoir part à l’armement et courir tous les dangers du voyage. La flotte se trouva prête le 20 mai 1499, et mit le même jour à la voile. On prit la route de l’ouest, et, tournant ensuite au sud, on ne fut pas plus de vingt-sept jours à découvrir une terre qu’on reconnut pour le continent. On rangea la côte pendant l’espace de quatre-vingts lieues jusqu’à celle de Paria, que l’amiral avait découverte. Ojéda n’eut pas de peine à la reconnaître sur les mémoires qu’il avait reçus de l’évêque de Badajos. Les noms de l’île de la Trinité et de Boca del Drago donnés par Colomb, et conservés depuis, attestaient qu’il avait vu le continent, et semblaient réfuter d’avance l’injuste prétention de Vespuce, qui se vanta dès ce moment d’avoir découvert l’Amérique. Mais l’envie, toujours jalouse des grandes choses, aima mieux accorder la gloire à celui qui avait fait moins, et la terre vue par Colomb n’en eut pas moins le nom d’Amérique. Le sort lui réservait bien d’autres traverses, et Colomb devait éprouver cette révolution si commune dans les grandes destinées, et qui souvent a placé le comble de l’humilia-