Page:La Revue blanche, t12, 1897.djvu/361

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« Le 18 mars a été la journée de la justice du peuple.

— « Peuple, voici le mandat que tu nous as confié : là où notre intérêt personnel commencerait, notre devoir finit : fais ta volonté. Mon Maître, tu t’es fait libre. Obscurs il y a quelques jours, nous allons rentrer obscurs dans tes rangs et montrer aux gouvernants que l’on peut descendre, la tête haute, les marches de ton Hôtel de Ville, avec la certitude de trouver au bas l’étreinte de ta loyale et robuste main. »

Que sont, dites-moi, en regard de cette superbe expression de la vérité, que peuvent être les manifestations de dissentiments ou d’ombrage plutôt, qui, dès le début, se manifestèrent au sein de la Commune à l’endroit du Comité central ?

Ayant volontairement cédé sa place provisoire à l’Hôtel de Ville, le Comité central devait pouvoir reprendre sans conteste celle qui avait été sa raison d’être, avant le 18 mars, dans la garde nationale.

Logiquement, il devait être la Commission de la guerre. — Pourquoi fut-il considéré avec défiance ? Pourquoi son action fut-elle annihilée sans qu’il fit, du reste, rien qui pût porter ombrage ?

Pourquoi ?… Sondez le cœur humain.

Et cependant ?… Le Comité, à l’Hôtel de Ville avait décidé, par convention tacite, que personne de ses membres ne prendrait part aux luttes électorales : c’est ainsi qu’un grand nombre ne brigua point les suffrages.

Ceux d’entre nous qui furent élus le 26 mars le durent, soit à leur notoriété, soit parce qu’ils n’avaient pas cru devoir observer la consigne.

La journée du 3 avril vint démontrer les funestes conséquences de cette politique ombrageuse de la Commune au début.

La garde nationale n’avait plus sa solide direction, l’impulsion des premiers jours de la Fédération ; aussi le mouvement militaire du 3 avril fut-il trop long à se former.

Il fallait, par trois voies diverses, être rendu aux abords de Versailles avant le point du jour ; on évitait ainsi la surprise du Mont-Valérien au petit jour, et l’on surprenait Versailles impuissant.

La lutte n’eût pas été longue ; les ruraux à Tours ou à Bordeaux, le plus loin possible, auraient couru chercher la sécurité.

Conséquences : Paris débloqué, le gouvernement de Thiers, celui de Mac-Mahon, les 24 et les 16 mai en moins, et nous ne serions pas actuellement âgés de vingt années écoulées de République opportuniste.

Pour faire cesser une situation si nuisible aux intérêts de la Révolution, mes amis me conseillèrent d’accepter la candidature aux élections complémentaires du 16 avril dans le xviiie arrondissement. Nous fûmes élus, Cluseret et moi.

À peine rentré à l’Hôtel de Ville, mon premier discours fut un appel à la sagesse de mes nouveaux collègues ; je voulais leur ouvrir les yeux sur les conséquences funestes de ces dissentiments. Je fus écouté, et, je n’en doute pas, je fus compris et approuvé ;