Page:La Saga de Gunnlaug Langue de Serpent, trad. Wagner, 1899.djvu/53

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frère Olaf Höskuldsson[1], qui comptait alors parmi les plus considérés de tous les seigneurs de l’ouest. Thorstein, comme on pouvait s’y attendre, fut bien accueilli. Or, un jour, dit-on, Thorgerd se trouvait engagée pendant le repas dans une conversation avec le bondi[2] Thorstein, son frère, qui occupait le siège d’honneur[3]. Olaf, pendant ce temps s’entretenait avec d’autres convives. En face d’eux, sur les bancs, étaient assises trois jeunes filles. Thorgerd dit alors : « Comment trouves-tu ces jeunes filles qui sont assises ici en face de nous ? » — « Très bien, » répond-il, « mais il y en a une qui est de beaucoup la plus belle ; elle a la beauté d’Olaf, le teint clair et les traits de nous autres, gens des Myrar[4]. » Thorgerd reprit : « C’est bien la vérité, ce que tu dis, frère ; elle a le teint clair et les traits de nous autres, habitants des Myrar ; mais avec la beauté d’Olaf elle n’a rien de commun, car elle n’est pas sa fille. » — « Comment cela se peut-il ? » dit Thorstein ; « elle est cependant ta fille. » Elle répondit : « Frère, pour te dire la vérité, cette enfant est ta fille ; » et là-dessus elle raconta tout ce qui s’était passé en le priant

  1. Généralement plus connu sous le nom de Olaf pái (O. le paon), ainsi appelé à cause de sa beauté et de l’élégance de ses manières.
  2. Bóndi = propriétaire libre.
  3. La place principale de la maison et aussi la plus spacieuse (stofa, all. Stube) servait de chambre d’habitation et de salle à manger. C’est là qu’on célébrait les festins. Elle pouvait parfois contenir des centaines de personnes. Elle présentait deux rangées de piliers ; au milieu de l’une d’elles se trouvait le siège d’honneur (öndvegi = sedes primaria), occupé par le maitre de la maison. Un second siège d’honneur, moins élevé et placé en face du premier, était réservé au plus considéré parmi les convives ; à droite et à gauche se trouvaient de longs bancs où prenaient place les autres personnes de la société. Les femmes avaient ordinairement leur banc particulier.
  4. Les Myramenn est le nom d’une famille célèbre dont le poète Egil Skallagrimsson était le chef. Elle habitait, aux environs de Borg, un district appelé Myrar (marais).