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— Leurs Altesses nous comblent d’honneur, et je ne sais comment exprimer ma reconnaissance.

— Les talents de Giovanni n’ont pas de prix. Et si vous l’aviez entendu, frère Ambroise : le prince Stiliagno, Gaétano-Greco et toute l’assemblée étaient dans le ravissement.

— Il va bientôt être à même de leur donner un plus grand essor : sous peu, il se rend à Naples.

— Comment ! vous nous quittez Giovanni ? dit Cécilia avec une expression chagrine : vous êtes discret !

— Je puis vous assurer, ma fille, reprit frère Ambroise, que Giovanni ne pouvait en rien vous faire part de cette décision : le prince Stiliagno et moi l’avons arrêtée sans en faire part à personne, et depuis quelques instants, j’étais à l’annoncer à Ludovic. Mais nous aurons le temps de nous revoir, Giovanni ne partant qu’avec Son Altesse,

— Mon frère, il ne lui reste alors que le temps de faire ses adieux : un exprès du roi rappelle le grand-écuyer ; les ordres sont précis, car le prince part à minuit, et voilà la sixième heure qui sonne au couvent.

— C’est Dieu qui le veut, répondit le moine avec une expression solennelle : résignons-nous ; et acceptons ce qu’il nous envoie. Enfant, pourquoi ce silence, et pourquoi trembles-tu comme agité par la fièvre ?

Tous les regards se portèrent sur Giovanni, auquel frère Ambroise adressait ces paroles. Une pâleur effrayante était répandue sur toute sa figure ; il semblait vouloir articuler quelques paroles ; mais ses dents, serrées l’une contre l’autre, l’empêchaient de se faire entendre.

— Giovanni, mon fils, qu’as-tu ? s’écria Ninetta. Mon Dieu ! mon frère, secourez-le ; il va mourir ! Et la pauvre femme couvrait de baisers le visage glacé de l’enfant ; elle le serrait contre son cœur.