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de la délicatesse poussée à l’excès ; car ce n’est qu’une avance pour le prix de ses œuvres. Vous qui connaissez mieux les besoins du ménage, acceptez de l’amitié cette somme qui peut vous être utile. L’étranger déposa sur les genoux de Ninetta une bourse remplie d’or. La Calabraise, croyant rêver, regardait avec méfiance l’argent et celui qui l’avait apporté.

— Je dois, avant de partir, vous demander de la musique. Giovanni me l’avait promise. L’étranger prit sur le clavecin un œuvre mis au net.

— Je vais le réveiller, signor.

— C’est inutile. S’il vous interroge, dites-lui qu’un ancien élève du Conservatoire, un de ses vieux amis, est venu. Et sans attendre davantage, l’étranger sortit.

Grâce à ce secours inespéré, la joie et l’abondance revinrent à la Calabraise. Giovanni seul devenait plus triste que de coutume. Ne sortant jamais de chez lui, il passait ses journées entières dans la rêverie ou à son clavecin. Le joyeux Logroscino voulait-il l’entraîner pour le distraire, l’orphelin se défendait. Un mois s’écoula ainsi, lorsque Logroscino vint de meilleure heure que de coutume chez son ami.

— Par tout ce qu’il y a de saints dans le ciel, tu vas venir avec moi.

— Tu me traîneras alors, car ma poitrine devient plus fatiguée.

— Et sans nul doute, mon cher, ma voiture m’attend.

— Vous êtes bien joyeux, Logroscino, dit Ninetta.

— Et qui ne le serait ? Grivaldi m’a fait appeler : on me joue dans quinze jours.

— Il serait vrai ?