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la gardienne du phare

détails… Je ne me souvenais seulement pas qu’il y avait un petit lac sur mon terrain. »

« Et qu’il est pittoresque ce lac, Madame !… Il me semble voir la clairière convertie en jardin et quelques sièges rustiques au bord du petit lac ; cela varierait si bien le paysage. … de saules, » et, malgré elle, Claire frissonna.

— « Vous n’aimez pas les saules. Claire ? » demanda Madame Dumond.

— « J’en ai peur » répondit la jeune fille, « tellement peur que je crois qu’ils me porteront malheur ! » et, encore une fois, Claire frissonna.

— « C’est que vous n’en connaissez pas la légende ; si vous la connaissiez, vous changeriez d’opinion probablement. »

— « Une légende ! s’écria Glaire. Oh ! j’adore les légendes et j’aimerais bien entendre celle du saule. »

— « Je vous la dirai bien ; la voici :

LE SAULE

L’obscurité planait sur le mont du Calvaire,
Une obscurité morne et profonde à la fois,
Car afin d’apaiser le courroux de son Père,
Le Rédempteur venait d’expirer sur la croix.

Sous le souffle de Dieu, jusqu’à terre, s’inclinent
L’orme, le peuplier, les saules, les sapins…
Les arbres ont frémi jusque dans leurs racines
Devant ce grand forfait qu’ont commis les humains.

Mais, lorsque la clarté reparaît, incertaine,
On voit les géants verts, soudain se redresser…
Le saule, anéanti cependant sous sa peine,
Vers le sol, humblement, reste le front baissé.

Jusqu’à la fin des temps, courbé, sans lassitude.
Restera, jour et nuit, le saule adorateur.
Toujours se complaisant dans son humble attitude
Et pleurant constamment la mort du Rédempteur.