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Paul Leroy-Beaulieu : Le propriétaire foncier est en quelque sorte le locataire de la société prise dans son ensemble et il lui doit une redevance pour l’usage des forces naturelles qu’il s’est appropriées.


Letourneau : Dans toutes les sociétés civilisées qui ont devancé la nôtre, l’intronisation du droit égoïste et sans frein de propriété individuelle a été l’avant-coureur de la décadence, la principale cause de la ruine. Une humanité plus éclairée, ayant enfin réussi à créer une science sociale, saura, on aime à le croire, éviter l’écueil sur lequel ont sombré Athènes et Rome.


Laveleye : La théorie de la propriété généralement admise est complètement à refaire, car elle repose sur des prémisses en contradiction complète avec les faits de l’histoire et avec les conclusions même auxquelles on veut arriver…

Aujourd’hui la propriété a été dépouillée de tout caractère social : complètement différente de ce qu’elle était à l’origine, elle n’a plus rien de collectif. Privilège sans obligations, sans entraves, sans réserves, elle semble n’avoir d’autre but que d’assurer le bien-être de l’individu. C’est ainsi qu’on la conçoit et qu’on la définit. Mobilisée par la facilité de l’aliénation, elle passe de mains en mains, comme les fruits

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