Page:Laforgue - Moralités légendaires.djvu/188

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fronde ; nous aurons encore des passages d’oiseaux avant le coucher du soleil.

— Cesse, ce bruit me fait mal. Et je ne veux plus tuer les oiseaux qui passent. Oh ! qu’ils passent, et revoient leurs pays. — Ô vols migrateurs qui passez sans me voir, ô hordes des flots toujours arrivant pour mourir sans rien m’amener, que je m’ennuie ! Ah ! Je suis bien malade, cette fois-ci... — Monstre ?...

— Bébé ?

— Dis, pourquoi tu ne m’apportes plus de pierreries, depuis quelque temps ? Qu’est-ce que je t’ai fait, dis, mon oncle ?

Le Monstre hausse somptueusement les épaules, gratte le sable à sa droite, soulève un galet et prend une poignée de perles roses et d’anémones cristallisées, qu’il tenait en réserve pour un caprice, il les dépose sous le joli nez d’Andromède. Andromède, toujours à plat-ventre accoudée, soupire sans se déranger :

— Et si je les refuse avec dureté, avec une inexplicable dureté ?

Le Monstre reprend son trésor et l’envoie sombrer vers les natales Golcondes sous-marines.

Alors Andromède se roule dans le sable, et gémit, ramenant ses cheveux sur son visage dans un désordre pathétique :

— Oh ! mes perles roses, mes anémones cristallisées ! Oh ! J’en mourrai, j’en mourrai ! Et ce sera ta faute. Ah ! tu ne connais pas l’Irréparable !