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trop monotone pour ma mobilité. Mais au premier moment je ne sentis que l’apaisement pieux, cette douce contagion de l’âme de ma mère qui se répandait sur ses pas comme l’ombre visible de la maternité. Je me fis une retraite, un silence et des occupations uniformes dans ma chambre, à l’exemple de ce que je voyais autour de moi.

Voici ce qu’était alors la maison paternelle, et de qui se composait le reste de la famille.


XVI


Mon père, ma mère, mes sœurs et moi, nous ne formions pas a nous seuls toute la famille. J’ai dit que mon père avait acheté une maison à la ville pour achever l’éducation de ses filles. C’est celle que nous habitions. Mais il y avait, en outre, dans un quartier plus élevé de la ville, l’hôtel de notre nom, la maison héréditaire de la famille, la demeure de mon grand-père autrefois, et maintenant la demeure du frère aîné de mon père et de ses deux sœurs, plus âgées que mon père aussi et non mariées ; maison haute, vaste, noble de site et d’aspect, et conservant ce reste de splendeur un peu morne que la révolution avait laissé sur les édifices dont elle avait frappé le seuil, immolé ou proscrit les habitants. Une porte massive, un long et large vestibule donnaient naissance aux rampes d’un escalier d’honneur ; au rez-de-chaussée, une enfilade de salles d’attente, de salles a manger et de salons magnifiquement pavés de marbre et lambrissés de boiseries sculptées, à dessus de portes peints et à glaces encadrées d’arabesques. Toutes ces