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CICÉRON.

république enfin, étaient dans le camp de Pompée ; les ambitieux, les factieux, les séditieux, les corrupteurs et les corrompus, la jeunesse, la populace et la soldatesque, les barbares même enrôlés dans les Gaules, étaient avec César. Mais César commandait à des soldats qui avaient tout à gagner en donnant l’empire à César ; l’autre, à des citoyens qui avaient peu à perdre en laissant succomber Pompée. Entre une cause servie par toutes les cupidités et par tous les vices héroïques et une cause pour ainsi dire abstraite défendue par des vertus amollies, la victoire était peu douteuse. César fut vainqueur ; Pharsale fut le tombeau de la liberté et de la république.

Bien que Pompée vieilli eût retrouvé en Épire toute l’ardeur et tout le génie militaire de sa jeunesse, et qu’il eût repris, avec le commandement des dernières forces de sa patrie, les rudes exercices du cavalier et du fantassin, l’activité, la sobriété, les veilles, les longues marches a pied, le maniement du bouclier et des armes, pour donner exemple à cette jeunesse efféminée de Rome ; découragé avant le combat, il y assista comme à ses propres funérailles plutôt que comme à une bataille dont il était lui-même l’âme et le bras. Il l’avait acceptée malgré lui, cédant à l’obsession des sénateurs et des jeunes nobles inexpérimentés dont il était entouré et dominé dans cette émigration de Rome. Il voulait user la fougue de César en lui refusant longtemps le combat ; ils voulaient, eux, l’affronter dans son ardeur, et avant de s’être rendus dignes de se mesurer avec lui : ils furent victimes de leur impatience et de leur indiscipline.

Aussitôt que Pompée, immobile sur une éminence au milieu de son armée, aperçut la poussière qui s’élevait autour de sa cavalerie repoussée par les vétérans de César, poussière que la fuite de cette jeunesse ramenait de son côté, il comprit son sort, et il ne tenta pas de le vaincre