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CÉSAR.

eux contre les novateurs ; enfin, qu’après tant de parricides, cette jeunesse armée devait sortir de Rome et aller rejoindre Catilina pour revenir avec lui contre la patrie !

L’absurdité de telles rumeurs en démontrait seule l’exagération ou la démence ; mais le peuple croit tout, les sénateurs ne demandaient qu’à croire, et Cicéron, ivre de peur et d’orgueil, croyait, sur la foi des plus légers indices, tout ce qui pouvait lui donner la gloire de sauveur de la patrie.

Catilina, pendant ces terreurs vraies ou artificielles de Rome, attestait, par sa conduite et pour sa perte, qu’il ne voulait a aucun prix ni la subversion de sa patrie, ni l’incendie, ni le meurtre, ni même la guerre civile ou sociale ; car, rejoint à Arezzo par des milliers d’esclaves qui lui demandaient des armes et qui lui auraient fait une armée d’un million de bras vengeurs de leur dégradation, il les refusa, les congédia, les renvoya à leurs sillons, et se borna à lever une faible armée de mécontents politiques, de soldats déserteurs, de partisans de l’émancipation des provinces et de gladiateurs aguerris aux dissensions civiles. Il attendait, de la seule existence de ce noyau armé, l’insurrection politique de l’Italie par l’exemple ; il savait que le drapeau civil des novateurs qu’il levait en Toscane était celui de César et des jeunes hommes populaires du sénat ; il ne doutait pas que l’opinion à laquelle il s’était dévoué ne répondit par une révolution à son signal.

Telle était toute sa conjuration, et tel fut le secret de ses lenteurs et de son immobilité dans la vallée du Picenum. Cela était si vrai que les démagogues effrénés et véritablement radicaux de Rome lui reprochaient, dans des lettres qui furent saisies, de ne pas chercher des auxiliaires partout et même dans les classes les plus abjectes, de repousser les esclaves et de ne pas allumer la guerre servile.

Possesseur de ces lettres d’objurgations démagogiques à