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CÉSAR.

parlait le premier ; la majorité se prononça pour le supplice.

César, sommé de dire son avis, embarrassé de condamner, plus embarrassé d’absoudre, fit un de ces discours équivoques de chef d’opposition dont les instruments ont forcé ou devancé la main, contraint par la circonstance de se déclarer, lâche s’il les abandonne, factieux et mauvais citoyen s’il les absout. Il louvoya entre deux écueils, détestant le crime, répudiant les hommes, se taisant sur Catilina, se rejetant sur les dangers des condamnations précipitées, sur de vagues professions d’humanité et de douceur, et enfin proposant, par condescendance à l’indignation publique, non la mort ou la prison dans Rome, mais l’exil des coupables dans les villes municipales de province. Là les exilés seraient sous la garde et sous la garantie des magistrats de ces villes. Cette conclusion à double entente avait, selon César, le mérite de satisfaire à l’opinion publique en condamnant à une apparence de peine, et le mérite de servir les partisans de Catilina en les envoyant subir leur peine précisément dans ces villes municipales des provinces où ils voulaient se rendre et où était toute leur force d’opinion et d’insurrection contre le sénat.

Ce discours ambigu, conservé textuellement par les sténographes de Rome, a été répété des milliers de fois dans les tribunes modernes par des orateurs sans sincérité, sans courage et sans vertu, plus soigneux de popularité que de justice.

Il dégoûta le sénat et indigna Caton ; Caton y répondit en grand homme de bien et en grand orateur dont l’éloquence est plutôt dans le caractère que dans les paroles. Nous avons aussi cette réplique de Caton. Elle montre par les insinuations directes, et encore plus par les réticences transparentes, ce que cet honnête homme, conscience vivante de son pays, pensait de l’innocence de César ; La voici. Pour qui sait lire au delà de la lettre morte, il n’y a