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CÉSAR.

Mais les Nerviens ne reculèrent point. Là où tombaient les guerriers du premier rang, ceux du second les remplaçaient, montés sur leurs cadavres. Ceux-ci périssaient à leur tour, et, les corps s’amoncelant, les derniers qui restèrent debout lançaient encore leurs traits et renvoyaient aux Romains leurs propres javelots du haut d’un monceau de cadavres. « De tels hommes, écrivait César en racontant cette journée (l’une des plus périlleuses de sa vie), avaient pu entreprendre sans témérité de franchir un large fleuve, de gravir des bords escarpés, d’attaquer dans un lieu défavorable : la grandeur de leur courage aplanissait pour eux tant de difficultés. »

La nation nervienne n’était pas vaincue, elle était anéantie. Les vieillards et les femmes, qui avaient été déposés dans une retraite fortifiée, au milieu d’un marais, envoyèrent des députés à César pour se soumettre. Ils lui dirent, pour lui donner une idée de leur désastre, « qu’il ne leur restait que trois sénateurs sur six cents, et cinq cents hommes a peine sur soixante mille combattants. »

César, voulant montrer sa compassion pour ces malheureux suppliants, pourvut à la conservation des débris d’un grand peuple, leur rendit leurs champs et leurs villes, ordonnant aux peuples voisins de s’abstenir de tout pillage et de toute violence à leur égard.

De tous les peuples de la confédération belge, les Aduatiques seuls avaient encore les armes à la main. Ce peuple tirait son origine des Ciinbres qui, après avoir ravagé la Gaule et l’Espagne, allèrent tomber, en Italie, sous l’épée de Marius. Six mille, demeurés autrefois dans la forteresse d’Aduat (Namur), avaient fait souche de nation, et, par leurs alliances, s’étaient accrus successivement jusqu’à. soixante mille. Ils comptaient dix-neuf mille guerriers.

Ces forces étaient en marche pour secourir les Nerviens, lorsqu’elles apprirent leur désastre. Elles revinrent pré-