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CÉSAR.

empêchèrent la flotte romaine de mettre à la voile. Puis elle hésitait à s’aventurer sur ce vaste océan sans bornes, dont elle ne connaissait ni les sondes, ni les îles, ni les ports.

Enfin elle parut au large. Toute la marine armoricaine, deux cent vingt, navires réunis dans le port de Vannes levèrent l’ancre et se rangèrent en ligne devant la flotte romaine. Brutus, qui la commandait, hésita sur le parti qu’il devait prendre et sur la manière dont il devait combattre.

En effet, les vaisseaux venètes étaient bien mieux disposés que les siens pour manœuvrer sur ces mers. La carène en était plus plate, et ils souffraient moins sur les bas-fonds et à marée basse ; la proue et la poupe, très-élevées, pouvaient mieux résister aux vagues et aux tempêtes. Le seul avantage des Romains était dans l’agilité de leurs rameurs.

Cependant le signal du combat fut donné et les deux flottes se mêlèrent. Les Romains attaquèrent d’abord avec l’éperon, mais ils ne tardèrent pas à y renoncer, ne pouvant entamer ces masses solides. Ils avaient établi sur leurs vaisseaux des tours, du haut desquelles ils lançaient des projectiles ; mais ces tours atteignaient et peine la poupe des vaisseaux venètes, les traits étaient presque tous perdus, tandis que ceux de l’ennemi frappaient sûrement et mortellement. Une seule invention leur fut d’un grand secours. Ils avaient fabriqué des faux bien tranchantes, emmanchées et fixées à de longues perches ; les soldats romains engageaient ces faux dans les cordages qui attachaient au mat les vergues des vaisseaux gaulois. Le navire ainsi saisi et accroché, on tirait à soi à force de rames, les cordages se coupaient et les vergues tombaient. Alors le navire, qui n’avait de mouvement que par sa voile et sa mature, perdait toute action. L’affaire se trouvait réduite à un combat d’abordage. De ce côté les soldats romains avaient tout