Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 34.djvu/307

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
306
CÉSAR.

Enfin Cicéron est aux environs de Rome et il voit Pompée qui attend encore quelque composition avec César.

« En m’entretenant des affaires de la république, écrit-il, Pompée n’a pas laissé ignorer que, dans son opinion, on ne pourrait échapper à la guerre ; qu’on ne devait plus espérer d’accommodement ; que depuis quelque temps il voyait bien que César ne voulait plus le ménager, et qu’il en avait eu depuis peu une nouvelle preuve ; que Hirtius, l’ami particulier de César, était venu depuis peu de sa part à Rome sans venir chez lui ; qu’il était arrivé le sixième de décembre au soir, et que, Balbus comptant parler le lendemain de grand matin à Scipion de l’affaire qui l’avait amené, il était reparti la nuit même.

» Pompée regarde cela comme une marque certaine que César veut rompre avec lui. En un mot, la seule espérance qui me reste, c’est qu’un homme à qui ses ennemis mêmes offrent un second consulat, et que la fortune a élevé si haut, ne sera pas assez insensé pour risquer de perdre tant d’avantages ; mais, si cela ne peut l’arrêter, combien vois-je de choses à craindre que je n’ose vous écrire !… Ah ! que c’est s’y prendre tard, s’écrie-t-il ailleurs, pour combattre un homme à qui depuis dix ans nous donnons à plaisir des forces contre nous !

» Il fallait arrêter les progrès de César dans leurs commencements, ce qui était fort aisé. Maintenant il se voit à la tête de onze légions, sans compter la cavalerie, dont il aura tant qu’il voudra ; il a pour lui les villes au delà du Pô, la populace de Rome, la plus grande partie des tribuns, et toute cette jeunesse perdue de débauches ; joignez à cela l’habileté, la réputation, l’audace d’un si grand capitaine. Voilà l’ennemi auquel nous aurons affaire si nous ne lui conservons un privilége qui lui a été confirmé par une loi.

» Il faut, me direz-vous, tout hasarder plutôt que de