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CÉSAR.

armes ? s’il est permis à un bon citoyen, pendant ces temps de troubles, de se retirer dans quelque lieu écarté ? si, pour recouvrer sa liberté, on doit s’exposer aux plus grands périls ? si, pour délivrer son pays d’un tyran, on doit y allumer la guerre et venir même assiéger sa patrie ? si ceux qui sont d’un sentiment contraire doivent néanmoins s’engager avec ceux du bon parti ? si, dans les dissensions publiques, on doit suivre la fortune de ses amis et de ses bienfaiteurs, lors même qu’ils ont fait des fautes essentielles et décisives ? si un homme, qui, pour avoir rendu à sa patrie de grands services, s’est vu exposé à la haine, à la jalousie et aux traitements les plus indignes, doit s’exposer une seconde fois à des maux qu’il peut éviter ? ou si, après avoir tant fait pour sa patrie, il ne peut pas faire quelque chose pour lui-même et pour sa famille, laissant à ceux qui sont en place le soin du gouvernement ? »

L’homme qui, comme César, pose de telles questions devant la conscience de citoyens vertueux, est plus qu’un tyran, il est le corrupteur de toute vertu civique.

Enfin la terrible nouvelle arrive. « Pompée s’est embarqué à Brindes avec toutes les troupes au nombre de trente mille hommes. Les deux consuls, les tribuns du peuple et les sénateurs, qui étaient à Brindes, se sont aussi embarqués avec leurs femmes et leurs enfants. Ils ont fait voile le quatrième de mars, et, depuis ce jour-là, le vent du nord a toujours soufflé. On dit qu’il a fait mettre en pièces ou brûler tous les vaisseaux qui restaient dans le port. Ces nouvelles ont été mandées ici à L. Métellus, tribun du peuple, par Clodia, sa belle-mère, qui s’est aussi embarquée. »

L’Italie reste tout entière aux mains de César. Il écrit en courant à Cicéron qu’il retourne à Rome, où il le convie à le rejoindre pour lui confier des négociations et des plans favorables à tous les bons citoyens. Ce billet caressant de