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CÉSAR.

César, un des rares monuments de sa politique qui nous restent de lui, témoigne assez du prix qu’il attachait à se rallier les hommes de bien après les avoir consternés. C’est la marche et la contre-marche de tous les usurpateurs.

« Comme je cours, dit-il, pour rejoindre mon armée, que j’ai fait partir avant moi, je n’ai pu voir votre ami Furnius qu’en passant, et je n’ai pas eu le temps de l’entretenir à loisir ; mais, tout pressé et tout affairé que je suis, je dérobe néanmoins un instant pour vous écrire, et j’envoie exprès Furnius pour vous porter les remercîments que je vous dois ; ce n’est pas la première fois que je vous en fais, et la manière dont vous agissez à mon égard me fait espérer que ce ne sera pas la dernière. Le plus grand plaisir que vous puissiez me donner maintenant, c’est de vous rendre à Rome, où je serai moi-même bientôt ; vos conseils, votre crédit, votre rang, votre autorité, m’y seront merveilleusement utiles pour finir comme j’ai commencé. Excusez-moi si je ne vous en dis pas davantage. Furnius achèvera. »

Un autre billet de César, de la même date, montre combien la victoire modifie a l’instant sa politique. Il ne songe plus qu’à se faire pardonner ses attentats pour légitimer sa puissance.

Certes, et par les dieux ! écrit-il, je me réjouis que vous approuviez ma conduite généreuse envers les lieutenants de Pompée à Corfinium ; je suivrai d’autant plus volontiers vos conseils de douceur qu’ils sont plus d’accord avec ce que j’avais résolu moi-même de me montrer le plus miséricordieux et le plus accommodant des hommes, et même de tendre à une réconciliation avec Pompée ; oui, tâchons ainsi de reconquérir toutes les volontés en notre faveur, et de jouir d’une victoire durable, puisque ceux qui avant nous se sont fait abhorrer par leur cruauté n’ont pu retenir longtemps leur puissance, excepté le seul Sylla,