Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 34.djvu/348

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
347
CÉSAR.

lement du devoir dans l’impossible, de la honte dans la nécessité, et s’il ne valait pas mieux implorer et recevoir le salut de la clémence des vainqueurs en envoyant des députations à César.

Pendant ce revirement du sénat, les troupes fugitives de Thapsus, campées sous les murs d’Utique, refusent d’y entrer, dans la crainte d’y être cernées par César et de partager le sort d’une multitude mobile et lâche, ne sachant ni se défendre ni se soumettre à propos. Elles demandèrent séditieusement que Caton les commandât et les conduisît dans les montagnes rejoindre l’armée numide de Juba. Caton s’efforça de les retenir ainsi que les membres du sénat de Rome qu’ils entraînaient déjà loin de la ville avec eux ; ses objurgations et ses larmes les émurent. Il rentra avec ces débris dans la ville, et les distribua, les uns aux portes, les autres dans la citadelle.

Mais le sénat municipal d’Utique, moins compromis dans la guerre que ces restes du sénat de Rome, s’alarma de voir sa ville au pouvoir des soldats et des sénateurs républicains. Ils envoyèrent sommer Caton de se rendre de nouveau dans leur conseil. Caton, désarmé, sortit de la citadelle avec confiance et se livra à eux. Son immense considération lui servait d’escorter et d’otage. Les notables d’Utique lui annoncèrent qu’ils avaient renoncé à se défendre, qu’ils envoyaient des députés à César, qu’ils imploraient sa clémence et qu’ils lui demandaient, pour première condition de la reddition d’Utique, le pardon et la vie de Caton.

Caton ne combattit point leur résolution nouvelle ; il comprit que le devoir pour les hommes était proportionné à la vertu, et que ce qui convenait à Caton pouvait ne pas convenir à des marchands d’Afrique.

« Faites, leur dit-il sans aucun reproche, ce qui peut assurer vos vies et vos fortunes, mais gardez-vous de rien