Page:Lamartine - Œuvres complètes de Lamartine, tome 34.djvu/350

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
349
CÉSAR.

gens qui s’obstinaient à imiter inutilement son stoïcisme. De ce nombre était Statilius, ennemi personnel de César, qui refusait de s’embarquer avec les autres pour subir le sort de Caton. « Désenflez ce jeune homme de son excès et de son exagération de vertu, dit-il au philosophe Apollonides, son ami, et portez-le a des résolutions plus sensées et plus utiles. » Il ne craignit pas même, tant il était sûr de lui, de fléchir sa rigidité pour les autres.

Lucius César, parent de l’usurpateur de la république, mais fidèle à la liberté, était dans Utique. Il consultait Caton sur une harangue pathétique qu’il comptait adresser au vainqueur de Thapsus pour en obtenir la vie ; « et, si j’obtiens ma grâce, je parlerai aussi pour vous, dit-il à Caton.

» — Si je voulais tenir la vie de César, lui dit Caton, je n’aurais qu’à me rendre à son camp sans avoir besoin d’autre intercesseur que moi-même ; mais je ne veux pas reconnaître un tyran en recevant de lui ce qu’il n’a pas le droit de donner. Car de quel droit accorde-t-il la vie et la liberté à ceux qui ont le droit de vivre et d’être libres plus que lui ? Mais quant à vous, examinons ensemble comment vous lui parlerez pour en obtenir votre amnistie et celle des Romains d’Utique. » Et il compatit à la faiblesse de Lucius César, comme s’il avait été son maître d’éloquence.

César n’en fit pas moins égorger Lucius, trouvant plus crime dans un parent ce qui n’était que patriotisme dans les autres.

Toutes ces sollicitudes étant accomplies pour la ville, pour les sénateurs, pour les fugitifs, et l’avant-garde de César étant déjà campée en vue des remparts, Caton parut détendre un moment son esprit comme un homme qui n’a plus qu’à se reposer dans sa conscience. Il convoqua les principaux citoyens du conseil d’Utique, quelques philosophes et quelques amis à souper dans la citadelle ; il s’y