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CÉSAR.

lâchetés du parti républicain. On feignait de croire, contre toute évidence, à son dessein de relever la république de ses ruines et de se réconcilier avec les patriciens, dont il avait maintenant besoin contre le peuple. « La crainte de nouvelles tables de prescription, dit-il lui-même dans ses Commentaires, qui suivent ordinairement les guerres civiles et les dissensions de pouvoir, glaçait les citoyens. »

Quant à son propre parti, Salluste, son flatteur, le dépeint ainsi en s’adressant à César lui-même :

« Des hommes souillés de dissolutions et d’opprobres, qui te croyaient prêt à leur livrer la république, sont venus en foule dans ton camp, menaçant les citoyens paisibles de brigandage, de meurtre, de tout ce qu’on peut attendre d’une âme dépravée. Mais quand ils ont vu que tu ne les dispensais pas de payer leurs dettes, que tu ne leur livrais pas les citoyens comme des ennemis, ils t’ont quitté. Un petit nombre seulement se sont crus plus en sûreté dans ton camp que dans Rome, tant ils avaient peur de leurs créanciers ! Mais il est incroyable combien d’hommes et quelles gens ont déserté ta cause pour celle de Pompée et choisi son camp comme un inviolable asile pour les débiteurs. »

Ce parti, dit l’auteur de l’étude la plus approfondie sur la politique de César, M. de Champagny, demandait avec insistance des tables de proscriptions nouvelles, des lois agraires, l’abolition des dettes, la suppression du prix des loyers et des fermages : c’est le cri de la faim qui se mêle partout et toujours aux cris des révolutions.

Ce parti, en l’absence de César pendant sa campagne d’Espagne, avait tout obtenu d’Antoine et de Dolabella, ses deux lieutenants à Rome. Il y avait eu deux camps dans la ville, celui des propriétaires et celui des prolétaires ; on s’était combattu sur le Forum, les uns pour la propriété,