Page:Langevin - La Pensée et l'action, 1950.djvu/133

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est l'histoire, dira-t-on, c'est l'expérience immédiate que l'on peut tirer de celle des faits du passé. Les difficultés qui existent du côté du passé existent également du côté de l'avenir, et comme l'a justement fait remarquer Hans Reichenbach, l'un de ses théoriciens les plus remarquables, le positivisme est obligé de faire jouer un rôle spécial à l'induction, d'où une source de grosses difficultés. La preuve que cette doctrine, livrée à elle-même, se ferme volontiers l'avenir et est une doctrine statique, c'est que son premier auteur, Auguste Comte, n'avait pas craint de fixer des limites aux possibilités de la chaîne expérimentale; il avait considéré que jamais nous ne pourrions connaître ce qui se passe dans les étoiles. Très peu de temps après, un démenti lui fut donné par la découverte de la spectroscopie; et ce matin même, nous avons pu entendre Sir Arthur Eddington parler de la température, de l'état de désagrégation des atomes, et faire une chimie nucléaire de l'intérieur des étoiles. Il est certain qu'en faisant jouer un rôle essentiel à la traduction des affirmations des lois scientifiques en langage d'expérience, c'est-à-dire en langage de sensations, cette doctrine prend volontiers une attitude opposée au réalisme[1]. Je crois que les physiciens se lieraient d'une

  1. Ce réalisme est essentiellement matérialiste. Cf. Lénine : « L'unique propriété » de la matière dont l'admission définit le matérialisme philosophique, c'est celle d'être une réalité objective, d'exister en dehors de notre conscience. (Matérialisme et empiriocriticisme, p. 225.)