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tant toujours mieux le monde extérieur, cette raison évolue, s’insinue de plus en plus près de cette réalité que nous connaissons et que nous dominons toujours davantage

Aujourd’hui on parle de « crise du déterminisme » alors qu’au vrai, la détermination objective des faits est mieux connue qu’elle ne l’était hier. Certes, à mesure que notre connaissance du réel progresse, nous sommes amenés à modifier la conception que nous nous faisons du déterminisme. Mais ceux qui présentent l’évolution de notre connaissance du déterminisme comme la faillite de celui-ci ont beau se réclamer de la science la plus moderne, ce n’est pas d’elle qu’ils tirent cette idée ; ils la tirent d’une vieille philosophie hostile à la science qu’ils cherchent à réintroduire dans la science[1].



Le marxisme était, pour Paul Langevin, à la fois l’achèvement et le radical dépassement de la philosophie des idées claires et distinctes et de la philosophie des lumières. Dans son discours inaugural pour l’Encyclopédie de la Renaissance française (1945)[2], où il a magnifiquement démontré une dernière fois l’impossibilité d’une raison « statique » aux catégories absolues, il a insisté sur le caractère contemplatif, hostile à toute pratique, non révolutionnaire, et en ce sens inhumain, qu’avait eu le déterminisme mécaniste du XVIIIe siècle ; il a expliqué quelle révolution de l’ancienne philosophie, même la plus avancée, le matérialisme dialectique représente. Mais cette transforma-

  1. La Pensée, 1re année, no 1, avril-mai-juin 1939, pp. 13-14.
  2. Reproduit dans La Pensée, n° 12, mai-juin 1947, pp. 8-12.